Céramique – Crochet
lieux :	phARTmacie 85, rue Picard	9
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J’ai 6 ans. Les épluchures de légumes bouillent dans une grande marmite dans la cuisine de ma grand-mère. Les peaux de lapin sèchent suspendues dans le jardin. Leurs poils brillent dans le soleil de l’été. Ma mère ne s’épile pas les jambes. 

Le soir, les femmes du voisinage se retrouvent au coin de la rue pour parler. C’est un rituel très apaisant pour la petite femme que je suis à l’époque. Les femmes parlent de choses et d’autres et elles croquent les graines de tournesol. Les coquilles vides tombent par terre. Je me dis que je ferai de même une fois grande. Mais je serai aussi une astronaute, c’était décidé. La question de s’épiler les jambes ne se pose pas encore.

A cette époque, la peau du pays où je suis née se met à craquer sous toutes les coutures. 

Je me cache derrière le fauteuil à housse en velours rouge dans le salon de mes grand parents pour voir les réunions de la partie communiste avec les miens. 

Je sens que quelque-chose est sur le point d’arriver sans pouvoir mettre des mots dessus.

Le salon de mes grand parents est garni de statuettes en céramique produites en série, dont la partie représente les femmes fortes: paysannes, ouvrières, mères, sportives. Tant de costumes à essayer plus tard.

Et puis un jour le rideau de fer a lâché. Un flot de productions visuelles et vestimentaires s’est déversé en emportant mes repères. Tant de nouveaux modèles d’écorces à expérimenter: les femmes de carrières, d’affaires et les femmes objets de désir. 

A ma demande ma mère m’acheta ma première poupée Barbie.

Le fait de s’approprier un certain pelage, d’essayer de se représenter à travers lui, de tenter d’appartenir à un groupe, d’en adopter les codes, puis de muer une fois de plus et de continuer la route un moment, perdue et sans rien. 

Il n’y a pas de vieux vêtements sans poux. jusqu’à une prochaine parure prometteuse.  

Mais laissons-nous vraiment nos anciennes peaux aux vestiaires ou bien superposons-nous les couches à la manière de poupées russes? 

Ya-t-il un moine sous les habits ou les habits sous le moine? Ces choses-là m’intriguent.